Respect aux « guerriers de la précarité »

En tant qu’intervenant depuis plus de 25 ans à Saint-Hyacinthe, j’ai souvent été appelé à rencontrer des familles ou des personnes que je qualifierais maintenant de « guerriers de la précarité ». Selon Le Robert, le terme précaire signifie : « Dont l’avenir, la durée, la stabilité ne sont pas assurés ». Lorsque j’utilise l’expression « les guerriers de la précarité », je me réfère principalement à la partie de la population la plus démunie. J’y inclus de la personne en situation d’itinérance jusqu’aux nombreux travailleurs dont le salaire permet à peine de boucler leur budget.

 

Ce sont des personnes comme vous et moi, des couples ou des familles que nous côtoyons tous de près ou de loin dans notre communauté. De nombreux préjugés circulent à leurs sujets. Pourtant, un des constats majeurs que j’ai pu faire, en tant qu’intervenant d’expérience auprès de cette clientèle, c’est que les causes ayant mené ces concitoyens vers un contexte de vie précaire sont très variées et rarement attribuables à la paresse.

 

Pour certains, ce sont des obstacles survenus, graduellement ou soudainement, dans leur parcours de vie. Il peut s’agir ici de problèmes de santé physique ou mentale importants qui peuvent avoir fait déraper une existence qui allait somme toute assez bien auparavant. Prenons également comme exemple un accident de voiture ou une blessure majeure qui représente des événements pouvant survenir à n’importe qui. N’oublions pas aussi les divers troubles d’apprentissage qui nuisent au fonctionnement scolaire et qui ne sont la faute de personne.

 

Pour d’autres, la vie n’aura jamais été facile depuis le tout début. La précarité était souvent déjà présente pour eux avant même leur naissance. Je pense ici à tous ceux qui ont traversé leur enfance et leur adolescence dans des milieux démunis sur différents plans. Ce sont souvent des familles où les parents ont fait leur gros possible, mais avec un coffre à outils limités. Dans ces situations, la précarité devient souvent intergénérationnelle et il est vraiment difficile de s’en sortir. Ce n’est pas impossible toutefois. J’ai vu plusieurs histoires de « fleurs qui poussent dans le ciment » pour reprendre une expression d’une chanson des Cowboys fringants.

 

J’en reviens maintenant à la raison pour laquelle je les qualifie de « guerriers de la précarité ». Ces personnes, pour qui la vie s’avère rarement simple, doivent constamment se battre pour réussir à répondre à leurs besoins de base, trouver leur place dans la société, se faire respecter, avoir accès aux ressources de soutien, comprendre le fonctionnement des institutions, etc. Ce sont des combats de tous les jours qui grugent énormément d’énergie et engendrent une charge mentale élevée constante. Oui, même ceux qui ne travaillent pas peuvent devenir épuisés par ces défis perpétuels!

 

Leurs lacunes sont parfois plus visibles que leurs forces, mais je vous invite à aller au-delà de cette première impression. La plupart des « guerriers de la précarité » sont des gens résilients, audacieux, courageux, débrouillards et persévérants devant les obstacles. J’ai été le témoin de beaucoup d’entraide mutuelle, d’échanges de trucs et de partages d’informations sur les ressources. Prenons le temps d’écouter leurs histoires et de comprendre les enjeux auxquels ils font face : ils se sentiront considérés dans ce qu’ils vivent. Saluons et accueillons ces personnes avec respect et considération dans nos commerces, organismes et institutions, mais aussi dans nos rassemblements familiaux ou nos contacts informels.

 

Aux « guerriers de la précarité », vous méritez notre respect! Tous les guerriers sur terre peuvent être découragés ou fatigués par moments, mais ne lâchez pas, car il y a toujours moyen d’améliorer des petites choses.

 

Je m’en voudrais de terminer cette chronique sans un mot de reconnaissance pour tous les intervenants et bénévoles de diverses organisations qui font de leur mieux pour soutenir ces « guerriers de la précarité ». Vous êtes des alliés vraiment importants, car les guerres ne se gagnent pas dans la solitude et l’isolement.

 

Respect!

 

Christian Boulanger

Conseiller en développement professionnel

1305-4, rue des Cascades, Saint-Hyacinthe (Québec) J2S 3H3

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